Non, ce ne sont pas "les-marchés" qui fixent les taux d’intérêt de la dette publique
Par RST le mardi, 29 mars 2016, 19:51 - Macroéconomie - Lien permanent
Paradoxalement, c’est dans le e-livre (« Le coup d’état monétaire – L’indépendance de la banque centrale, mère
de toutes les erreurs de pilotage monétaire ») de Mathieu Mucherie,
monétariste convaincu, disciple avoué de Milton Friedman, que j’ai trouvé ce
passage qui confirme l’une des démonstrations les plus éclatante du
néochartalisme à savoir que c’est la Banque Centrale qui, à travers le taux
directeur, fixe tous les autres, y compris celui de la dette publique comme
l’explique par ailleurs Jean-Baptiste Bersac dans «Devises – L’irrésistible émergence de la monnaie ».
« C'est le banquier central qui, fixant le taux d'intérêt de référence ou « taux directeur » (en clair, les taux de court terme), de façon souveraine et discrétionnaire, exerce un véritable magistère sur le prix du temps, sur toute la courbe des taux, et une influence considérable sur les taux de changes ainsi que sur l’immobilier, dans une mesure moindre. Il n'y a plus que dans les vieux manuels que les taux de changes évoluent en fonction des soldes commerciaux ou budgétaires; dans la réalité, c'est le différentiel de politique monétaire qui est déterminant. Même sur un marché plus étroit et en apparence plutôt lié aux considérations microéconomiques, celui des actions, les gérants passent désormais plus de temps à décortiquer les communiqués de la FED et de la BCE qu'à analyser les comptes des entreprises ou leurs perspectives. Une grosse boite est gérée à peu près de la même façon qu'elle soit cotée à New York ou à Paris, et de plus, les firmes européennes ne sont pas détenues que par les Européens; les indices actions étaient donc traditionnellement très corrélés, pour ne pas dire fusionnels. Mais depuis fin 2009 et jusqu'à fin 2013, un écart de plus de 40 % en monnaie commune s'est créé, au détriment des actions de la zone euro, du fait principalement des écarts persistants de politique monétaire de part et d'autre de l'Atlantique. »
Monétaristes et néochartalistes, étonnamment, se rejoignent donc ici pour affirmer
ce qui – c’est le moins que l’on puisse dire – n’est pas vraiment conforme à l’orthodoxie
rabâchée par tous les commentateurs institutionnels, à savoir que « Les marchés sont disciplinés par l’Etat »
pour reprendre l’expression utilisée par Bersac qui rajoute « au point
d’être des figurants quant à la dette publique »
Je signale au passage que j’ai acheté le livre
électronique de Mucherie mais que, allergique à la lecture sur écran, je
désespère d’obtenir un exemplaire sous la forme d’un bon vieux livre papier. Si
quelqu’un a une suggestion, je suis preneur car j’espère, en le lisant,
comprendre comment je peux arriver à tomber d’accord avec un affreux
monétariste après tous les efforts que j’ai déployés pour devenir un bon
keynésien.