Tout d’abord, il convient de répondre à la question de Simonnot sur la raison cachée de l’euro. Je ferai pour cela appelle à Edouard Husson qui, lors du  colloque dont j’ai parlé dans un billet précèdent, a souligné que l’euro ne s’était pas fait dans les années 80, malgré les promesses de Valéry Giscard d’Estaing   et que c’est la réunification de l’Allemagne qui a provoqué sa création. Il a été fait en échange de cette réunification, sur le modèle du Mark : c’est un accident de l’Histoire ! Faut-il alors s’étonner dans ces conditions, comme l’explique Simonnot, que l’instance économique prévue à l’origine dans le plan Delors pour contrebalancer le pouvoir de la banque centrale ait été « oublié en route » ? Pas vraiment puisque l’on peut imaginer que dans la précipitation et l’urgence du moment, les questions qui fâchent aient été évacuées.
A propos de Delors, j’ai noté le commentaire d’un intervenant du colloque selon lequel l’ancien président de la Commission européenne pensait que l’Europe politique serait une conséquence de l’Europe économique à échéance de 2 ou 3 ans. En supposant que cela eut réellement été son sentiment, il est clair qu’il s’est trompé. Quant à ceux qui imaginaient que la création d’une monnaie commune – qui, selon Simonnot, n’était pas prévue par le traité de Rome de 1957 –  faciliterait l’union politique, ils mettaient tout simplement la charrue avant les bœufs : la monnaie est une conséquence de l’union politique d’une communauté humaine, non un préalable.

Pour en revenir à l’étalon-or, comment peut-on envisager de lier la monnaie à une ressource rare dont les variations de niveau de production peuvent entrainer des fluctuations de la masse monétaire ? Comment régule-t-on ce phénomène et son impact sur la croissance ? De plus, et c’est Philippe Raphaël qui le rappelait, toujours pendant ce même colloque, l’étalon-or a le gros désavantage de fournir une rente de situation aux pays producteurs. Il me semble tout bonnement que ses partisans se trompent de siècle. Au lieu de regarder dans le rétroviseur de l’Histoire, ils feraient mieux de s’interroger sur les possibilités offertes par les technologies modernes comme Internet,  pour développer des monnaies adaptées aux nouvelles exigences de notre temps plutôt que de s’entêter à lier le fonctionnement de l’économie à des minerais péniblement extraits du sous-sol .

En conclusion, l’article de Philippe Simonnot me parait intéressant à plusieurs égards, mais il pêche par la faiblesse des arguments présentés pour justifier de l’intérêt de l’étalon-or. Cela se résume, en gros, à dire que «L'histoire enseigne que la monnaie-papier n'est tout simplement pas viable à long terme ». Cette affirmation gratuite est loin de convaincre l’ignorant que je suis.