J’ai été soulagé de constater que l’ancien député européen nous épargnait l’argument massue largement éculé des euro béats, selon lequel le principal bienfait de l’Europe serait de nous avoir apporté la paix. En fait, comme j’ai pu le constater dans cet article du Monde, il a une position assez iconoclaste sur le sujet, scandaleuse même selon lui,  puisqu’il considère "que ce n'est pas l'Europe qui a fait la paix, mais la paix qui a fait l'Europe". Je me souviens d’un autre centriste, Jean-Marie Cavada qui, lors d’une rencontre avec des jeunes de banlieue il y a quelques années de cela, leur avait vanté l’Europe sur le thème "l’Europe égal la Paix". Je me suis toujours demandé quel impact cela pouvait avoir sur des gamins de 12/13 ans pour qui la dernière Guerre Mondiale doit, dans l’échelle du temps, se situer juste après les dinosaures !

Au cours du débat avec le public, Jean-Louis Bourlanges a réagit à l’une de mes interventions dans laquelle je prétendais qu’on nous imposait l’Europe à marche forcée et que cela allait mal se terminer. Il a réfuté cette vision des choses, affirmant que l’origine des problèmes était qu’on avait fait l’Europe à moitié seulement. Voila donc qu’on nous ressortait l’argument selon lequel si l’Europe ne marche pas, c’est qu’il n’y a pas assez d’Europe. Mais à la différence de la plupart de ceux qui le font pour adopter une posture qu’ils pensent dans l’air du temps, Bourlanges le fait, me semble-t-il, par réelle conviction. J’ai pu en effet pu constater au cours de son intervention que le conseiller maître à la Cour des comptes est un fédéraliste convaincu. Il dénonce avec vigueur ceux qui, selon lui, font semblant de faire l’Europe à l’instar de Barroso, "l’homme qui ne dit rien en cinq langues" et de tous ces chefs de gouvernements qui nomment des potiches à la tête des institutions européennes afin d’éviter de perdre de leurs prérogatives. Il nous rappelle que nous vivons dans un monde dangereux. Après la fin de certaines illusions (hyper puissance américaine éternelle, mondialisation nécessairement heureuse et contagion démocratique inévitable), l’Europe a besoin de solidarité – c'est-à-dire de plus d’Europe – si elle veut survivre au 21ème siècle. 

Je ne partage pas le point de vue de Monsieur Bourlanges. Je ne crois pas à son Europe. Je ne crois pas que l’on puisse obtenir de manière artificielle et forcée, que les 27 pays qui la composent deviennent la zone monétaire optimale à laquelle il fait référence en citant Milton Friedman, condition nécessaire, mais pas suffisante, pour que tout l’édifice ne s’effondre pas. Je respecte néanmoins ses positions qu’il expose avec conviction, d’autant plus qu’il est de ceux qui mettent leurs actes en accord avec leur pensée puisqu’il a démissionné du Parlement Européen, déçu, semble-t-il, par la lenteur de la construction européenne… à moins que ce ne soit par lassitude, après tout de même18 ans de bons et loyaux services !