Les premières interventions ont présenté la modélisation macroéconomique et les outils utilisés. Je suppose que la naïveté confondante avec laquelle les oratrices ont reconnu les limites de l’exercice est due à leur jeunesse, formellement revendiquée par l’excuse d’« être trop jeune » pour répondre à l’une des questions posées. Elles admettent en effet sans ambages que leurs « outils ont un peu de mal à expliquer l’évolution la plus récente des salaires depuis la crise » ou que « Mésange n’est pas forcément le meilleur outil pour comparer les données ». Mais qu’à cela ne tienne, on a que ça et on va donc faire avec, comme tout bon économiste orthodoxe qui se respecte, à qui on a appris à faire coller la réalité à sa théorie et qui ne veut pas perdre sa place. Et non seulement on va faire avec mais en plus, quand il faudra calibrer, et bien, faute de mieux on prendra les coefficients « trouvés dans la littérature », parce que, là encore, on n’a rien d’autre de disponible ! Ha, cette « littérature », combien de fois au cours de la journée on fera appel à elle pour se rassurer et renforcer le poids de démonstrations qui risqueraient sinon, de manière trop flagrante, de ne pas paraitre assez solides !
Dans ces conditions, il est assez difficile pour le profane d’accorder une crédibilité quelconque à tous ces débats, très techniques au demeurant, et qui donnent l’impression que l’on cherche désespérément à maltraiter les diptères sauver ce qui peut l’être d’une théorie que l’on sait bancale – comme la fameuse courbe de Phillips qui « a été très utilisée, mais aussi très critiquée car elle est basée sur une observation empirique, et il manque des fondements théoriques » –mais sur laquelle on se repose, à défaut d’autre chose, pour essayer d’établir au forceps les liens que l’on imagine exister comme, par exemple, entre « institutions du marché du travail » et « rigidité des salaires ». Aucune conclusion définitive ne pouvant être formulée, et en dépit des contradictions flagrantes qui se font jour – par exemple le fait que « la rigidité des salaires aux Etats-Unis est assez élevée » malgré « une institution du marché du travail assez flexible » – on se contente de finir sur des résultats qu’on essaye de présenter de manière cohérente et à partir desquels chacun trouvera vraisemblablement à boire et à manger.

Et j’imagine que c’est comme cela qu’on en arrive à émettre des rapports considérant les soi-disant effets néfastes du salaire minimum alors que le simple bon sens permet de comprendre qu’il faut payer les gens suffisamment pour qu’ils puissent vivre de leur travail !