François Ruffin nous propose un petit livre original, une espèce de « Guide du Routard en Euroland » au moyen duquel il nous promène dans Bruxelles, à la découverte de certains de ses symboles, priez pour nous. Comme il l’explique lui-même, "on s’est baladé à Bruxelles et on a repéré, comme ça, en flânant, des détails qui marquent l’emprise de la finance sur le projet européen". Ruffin donne une dimension physique, matérielle à cette Europe qui reste la plupart du temps une abstraction. Il nous propose surtout, un tas de raisons, en supposant que nous en manquions, pour nous convaincre que définitivement, oui, il faut faire sauter Bruxelles. Cela va du rappel de l’existence de lobbies puissants, dont le rôle est glorifié sans aucun état d’âme ni fausse pudeur sur une plaque commémorative à l’entrée du Parlement, au démontage de la statue de Jacques Delors, véritable « mascotte pour office du tourisme » dont le portrait géant s’affiche dans les rues et qui a un bâtiment à son nom, pour le remercier d’avoir été l’artisan zélé de l’Europe libérale tout en essayant de faire oublier qu’il a surtout été le pire ennemi de l’Europe sociale.

On le sait, mais il faut le répéter en donnant des noms, des dates et des preuves, comme le fait Ruffin, que les financiers sont au cœur du projet européen depuis sa fondation.  Comme le dit Geoffrey Geuens interrogé dans le livre :

"On comprend […] qu’un petit cercle, bien organisé, une oligarchie disons-le, parvienne à « construire l’Europe ». Et inutile de convoquer la thèse du grand complot, ou on ne sait quel fantasme conspirationniste, pour expliquer ça : les milieux d’affaires ont simplement bien compris leurs intérêts de classe, ils les défendent avec intelligence, ils renforcent leurs solidarités au sommet, ils obtiennent le soutien sans faille, ou presque, des pouvoirs publics."  

J’ai les allumettes. Qui amène la dynamite ?