Dans son ouvrage, Varoufakis analyse les forces à l’œuvre dans la construction européenne. Le rôle des principaux pays comme les USA, l’Allemagne et la France sont mis en évidence à travers l’action de leurs divers dirigeants.  Et l’on constate que c’est bien à une guerre que se sont livrées – et que se livrent toujours – ces nations pour assoir leur pouvoir et leur influence à titre collectif mais aussi parfois au niveau des individus, pour obtenir des postes. Les victimes sont certes moins visibles que dans les conflits armés mais pas inexistantes ni moins nombreuses pour autant, l’austérité étant une arme de destruction massive. Un des objectifs de cette guerre était de museler l’Allemagne après que les USA lui aient permis de redevenir une puissance économique, nécessaire pour permettre l’émergence d’un amortisseur économique en Europe, comme le Japon en Asie.
Le problème des déficits commerciaux  revient tout au long du livre et est présenté, – surtout lorsque les taux de change sont fixes ! – comme la cause de graves déséquilibres, qu’un système comme le Bancor proposé par Keynes aurait permis de résoudre pacifiquement. Mais à l’époque où ce principe fut mis sur la table, les USA ne pouvaient accepter que d’autres leur dictent comment utiliser leurs excédents. Nous en payons toujours les conséquences aujourd’hui !

Ce livre est très bien écrit, avec de nombreux rappels qui permettent de bien s'imprégner des arguments développés. On sent l’influence du professeur d’économie faisant preuve de beaucoup de pédagogie. Son explication historique du fonctionnement du système monétaire est passionnante et démontre que, dès l’origine, l’euro était voué à l’échec. Ce qui est saisissant cependant, c'est qu'après avoir écrit tout ça  Varoufakis cherche toujours à sauver l'Europe ! Il n'arrive pas à se débarrasser du mythe d'un peuple européen alors qu'il ne démontre à aucun moment, son existence. Il reconnait en définitive qu'il n’y a que deux solutions possibles : la fin de l’expérience ou le fédéralisme ... et il propose malgré tout une solution intermédiaire !  Il semble que le souvenir  de la dictature militaire en Grèce ait créé un tel traumatisme chez lui, que la seule façon d’éviter que cela ne recommence soit la création de l’Europe. Mais peut-on la réussir sans l’adhésion des peuples ?