Disons le tout net, au risque d’être désobligeant vis-à-vis de nos hôtes : ceux qui se présentent comme des Eurolandais – quel terme horrible – m’ont donné l’effet d’être les croyants d’une nouvelle religion, des fanatiques souhaitant débattre entre fanatiques, des individus vivant sur une autre planète, l’Euroland dont les réalités sont aux antipodes de celles que nous vivons ici sur terre, et plus particulièrement en Europe. Ils prétendent se battre pour la démocratie mais n’en respectent pas l’un des principes fondateurs, la liberté d’expression. Ni mon intervention – dans laquelle je critiquais leurs explications de la crise – ni celle de Laurent – dans laquelle il abordait le problème de la libre circulation des capitaux – n’ont été jugées digne d’intérêts. Elles ont tout simplement été ignorées. J’ai assisté à de nombreuses manifestations de ce genre et c’est la première fois que cela m’arrive. Pourquoi donc, dans ces conditions, m’avoir invité si c’est pour refuser le débat ?  

Sur le fond, une fois passé le constat que l’Europe actuelle ne fonctionne pas, tout le reste est à l’avenant. Mis à part la vénération frénétique de l’Euro et de ses supposés bienfaits et la croyance en une citoyenneté européenne toute théorique, il est impossible de dire quelles sont les thèses défendues par les Eurolandais et encore mois de comprendre quelles sont leurs propositions. Les interventions en français, anglais ou allemand se sont succédées sans aucun lien les unes avec les autres et sans qu’aucune conclusion ne soit jamais tirée. Certaines contradictions flagrantes entre les différents intervenants n’étaient même pas relevées pour être analysées et débattues. Les explications sur la crise économiques ont été incompréhensibles, sombrant même dans le ridicule lorsque pour dénoncer les méfaits de l’inflation liés à la création monétaire, le Zimbabwe est donné en exemple. Les concepts s’entrechoquent joyeusement sans aucune consistance globale tout en laissant planer de sérieux doutes sur la santé mentale des intervenants. Cela va de « la guerre monétaire, c’est pire qu’une guerre thermonucléaire »  à  « la vacuité des politiques au niveau d’un état » en passant par « il faut uniformiser les européens, il ne faut plus de France ». Le summum a peut-être été atteint lorsque Marie-Hélène Caillol, présidente d’Europe2020 a expliqué que les populations issues de l’immigration se sentaient plus européennes que les européens de souche. « Dans le Thalys il y a des technocrates et des immigrés » déclare-t-elle sans même sembler voir le gouffre de contradictions qu’un tel constat révèle. En somme, un bon Eurolandais serait un homme qui a été, à un moment donné, obligé de renoncer à ses racines ?  Et je ne m’attarderai pas sur la prédiction fantasmagorique de Franck Biancheri qui dénonce, sans rire, le risque de nationalisme européen : « le National européisme sera au pouvoir en Europe avant la fin de la décennie ». La haine de la nation qui inspire nos Eurolandais, associée à leur délire européiste leur fait désirer dans le même temps une chose et son contraire : l’émergence d’une citoyenneté européenne sans la création d’une nation européenne correspondante. 

Je n’ai hélas rien retenu de très constructif de cette journée. Je suis convaincu que je n’aurais pas été plus surpris si je l’avais passée avec une bande de bisounours schizophrènes ayant fumé du crack. J’aurais sûrement été moins effrayé !