L’Euro, présenté comme une ligne de défense face à la globalisation, en a au contraire, accéléré les effets. Il a été construit sur un compromis entre le pays dont la monnaie était la plus forte, l’Allemagne, et les autres partenaires. L’Allemagne consentait à mettre dans la corbeille de mariage ses taux d’intérêt qui étaient à l’époque plus faibles que ceux de ses voisins en contrepartie de l’ouverture de leurs marchés aux exportations allemandes sans risque d’une soudaine dévaluation. Telle est bien la raison d’être profonde de l’euro, et non la théorie des zones monétaires, que l’on a en permanence tordue dans un sens ou dans l’autre pour justifier ce qui était un immense marchandage. Or, depuis la fin de 2007, le cœur du marché est rompu. Les taux entre l’Allemagne et ses voisins ont recommencé à diverger, et parfois, comme aujourd’hui pour la Grèce, l’Irlande et le Portugal, de manière dramatique. Même des pays considérés comme présentant (pour l’instant) de faibles risques, telle la France, voient leurs taux augmenter régulièrement. Ce compromis était une nécessité absolue pour l’Allemagne, et l’on peut comprendre ainsi que ce soit elle, par l’entremise du chancelier de l’époque, Helmut Kohl, qui ait demandé à ce que l’euro soit une monnaie unique et non, comme on le proposait aussi à l’époque, une monnaie commune. Tous les discours qui, par la suite, ont cherché à justifier ce basculement d’une solution raisonnable (la monnaie commune) à une solution déraisonnable (la monnaie unique), au prétexte d’une avancée vers une Europe fédérale, n’ont été que des justifications plus ou moins alambiquées et controuvées de ce fait.

Aujourd’hui, il est patent que le compromis initial est mort. L’Allemagne a clairement tiré tout le profit – et même plus – qu’elle pouvait espérer du marché de ses voisins. Par ailleurs, l’euro est devenu un facteur de blocage des politiques visant à mieux se protéger contre la spéculation financière.