Et s’il était le ministre de l’Economie de la France, que ferait le banquier du diable ?
Par RST le lundi, 6 avril 2015, 14:21 - Notes de lecture - Lien permanent
C’est la question que 20minutes.fr a posé à l’économiste Jean-François Bouchard, auteur d’une biographie passionnante de Hjalmar Schacht intitulée « Le banquier du diable ». Celui que l’auteur n’hésite pas à qualifier de « plus grand des économistes du XXe siècle » - mais aussi de « salaud ordinaire » - fut indéniablement, grâce à son génie en matière économique et financière, à l’origine de la puissance d’Adolf Hitler auquel il s’opposa ensuite, ce qui lui vaudra d’être déporté en camp de concentration. Dans la deuxième partie de sa vie, il fut l’artisan du succès économique de nombreux pays en voie de développement. Pouvons-nous aujourd’hui tenter d’imaginer, sans pour autant passer pour des nostalgiques du III ème Reich , quelles seraient les recommandations de celui qui sauva à plusieurs reprises l’Allemagne de la ruine ?
Bouchard n’hésite pas à le faire en imaginant que « sa priorité ne serait sans doute pas de restaurer les comptes publics mais de résorber le chômage. Pour atteindre cet objectif, il mettrait au point un véritable plan de guerre au service de la transition énergétique. Il ferait émerger de grandes industries capables de produire des panneaux solaires, des piles à combustibles, etc. La Banque publique d’investissement (BPI) pourrait financer ce plan… A condition de ne pas respecter certains traités européens, qui interdisent aux Etats de financer directement leur économie productive. »
D’autres avant Bouchard
avaient essayé de tirer les leçons du spectaculaire redressement économique de
l’Allemagne mis en œuvre par Schacht. Gabriel Galand et Alain Grandjean y
consacrent un chapitre de leur livre « La monnaie dévoilée » qu’ils
résument ainsi : « L’expérience
allemande de relance de l’économie et de résorption d’un énorme chômage en
quatre ans n’est pas un miracle diabolique e de l’Allemagne nazie. Certes, le
contexte social et politique était très particulier, et il n’est heureusement
pas reproductible. Mais d’un point de vue économique, l’explication de ce
"miracle" tient essentiellement dans une vigoureuse relance par l’Etat,
relance que celui-ci a financée par une création de moyens de paiement, sans
inflation. La réussite est due au mécanisme ingénieux de génération et d’utilisation
de ces moyens de paiement. »
Etrangement, à
aucun moment nos deux auteurs ne nomment ce mécanisme par son nom, les bons
MEFO qui ont constitué, comme l’écrit Bouchard, une masse monétaire bis gagée
en grande partie sur la confiance – clé de la réussite en économie – inspirée
par Hjalmar Schacht. Faut-il conclure de la pudeur apparente de Galand et
Grandjean que certains mots sentaient encore le souffre dans un passé récent ?
On peut le croire si l’on se réfère à ce texte d’André-Jacques
Holbecq publié sur le blog "Plus loin que Jorion" et dans lequel
il explique comment il a été ostracisé pour avoir osé prétendre traiter ce
sujet dans un de ses livres. Il ne fait pas bon avoir raison avant les autres !
Mais les temps ont changé et il semble que les esprits soient mieux disposés à
entendre ce que le banquier du diable pourrait avoir à nous dire, quant aux
principes élémentaires régissant une politique économique ayant un minimum de
chance de réussir. Cela tient en quelques mots que Bouchard met dans la bouche
de Schacht: « Déterminer quelle
est la priorité ; consacrer tous les moyens possibles et impossibles à la
régler ; avoir une stratégie à moins de cinq ans. Voilà les trois
paramètres d’une équation économique ayant quelques chances de réussir. Et l’on
constate que ces trois paramètres sont tous des questions de timing. CQFD »
Nos dirigeants actuels présentant les mêmes caractéristiques d’incompétence et d’indécision que ceux en place en Allemagne en 1932, espérons seulement que celui qui mettra un jour les principes décrits ci-dessus en pratique, n’entrainera pas l’Europe et le monde dans une nouvelle apocalypse.