Alexander Göbel et Philippe Pognan nous rappellent les événements   dans un article publié sur dw-world.de :

Ken Saro Wiwa avait lutté de manière non violente pour une meilleure utilisation des revenus pétroliers. Son objectif était d’améliorer les conditions de vie de la petite ethnie des Ogonis, qui habitaient une importante zone de production pétrolière et qui était victime de tous les inconvénients de cette industrie polluante. Dans un procès qualifié de farce par les observateurs, les neuf activistes avaient été déclarés coupables de meurtres. En fait, le dictateur militaire Sani Abacha voulait briser toute résistance contre la production pétrolière dans le delta du Niger et particulièrement dans l'Ogoni land, la région natale de Ken Saro-Wiwa.  

Depuis les années 50, c’est dans des conditions catastrophiques pour l’environnement que l’on extrait  le pétrole au Nigeria. Mais ce n’est qu’au début des années 90 que la résistance de la population n’a trouvé un écho international avec le soulèvement de l’ethnie Ogoni.
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Saro-Wiwa avait prêché la résistance pacifique et lutté pour les droits de son ethnie  Ogoni, l’une des 250  ethnies que compte le Nigeria.
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L’écrivain et activiste souffrait de voir que des milliers de kilomètres d’oléoducs traversaient des terres  anciennement fertiles, que des vapeurs nocives, des puits à ciel ouvert et une expropriation généralisée transformaient chaque jour un peu plus la terre des Ogoni en un paysage lunaire dont les forêts disparaissaient à tout jamais et où la misère des habitants ne faisaient que croître.
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Son combat non-violent contre l’exploitation pétrolière effrénée par la multinationale Shell ne plait pas à la dictature militaire qui tire grand profit de la manne pétrolière. Les juges qui dans un faux semblant de procès ont condamné à mort  Ken Saro-Wiwa et ses compagnons de lutte ont admis par la suite avoir été corrompus. Ken Saro-Wiwa Junior croit savoir par qui: "Nous sommes certains que  Shell a joué un rôle important quand des Ogoni ont été torturés et pendus, quand des villages entiers ont été détruits,  les sols  pollués,  tant de gens expulsés. Shell a ses responsabilités dans tout cela."

Et cette responsabilité a d’une certaine manière été démontrée puisque la compagnie anglo-néerlandaise a accepté en 2009 de payer 15,5 millions de dollars pour éviter un procès.

« Vivre ou mourir est immatériel. » nous dit Ken Saro Wiwa. « C'est un comble pour moi de savoir qu'il y a des gens qui sacrifient du temps, de l'argent et de l'énergie pour lutter contre ce mal parmi tant d'autres à travers le monde. S'ils ne réussissent pas aujourd'hui, ils réussiront demain. Nous devons continuer à nous battre pour un monde meilleur pour tous les hommes - chacun contribuant un tout petit peu à sa manière. Je vous salue tous »

Et si ils ne réussissent pas demain, ce sera pour après demain ? Quinze ans ont passé depuis la mort de  Ken Saro Wiwa. Rien n’a changé. Shell mais aussi Total, parmi tant d’autres compagnies pétrolières, continuent leurs activités. En toute impunité. En France, 10% de notre carburant vient du Nigeria….