Jean-Claude Trichet, responsable mais pas coupable ?
Par RST le mardi, 23 mars 2010, 18:31 - Macroéconomie - Lien permanent
Dans un
excellent article,
« Depuis
le traité de Maastricht, on nous a raconté que l'indépendance des banques
centrales était la condition nécessaire pour une bonne gestion de la monnaie,
qu’il fallait mettre à l'abri des décisions des gouvernants, par essence
électoralistes et aux conséquences nécessairement désastreuses. Les décisions
de politique monétaires ne seraient donc que des mesures d'ajustement
techniques, prises objectivement et presque mécaniquement, sans que l'idéologie
n'intervienne. Une pure affaire d'experts devant rester en dehors du débat
public.
Le gouverneur de la BCE, Jean Claude Trichet
vient de donner cette semaine une interview à l'hebdomadaire « Le point » qui me semble
faire voler ce mythe en éclats. Si notre grand argentier est toujours très
sourcilleux quant à son indépendance à l'égard du politique, il semble faire
une bien grande allégeance à l'égard du pouvoir financier. »
En ce qui me concerne, je ne sais
pas si les motivations conscientes de Trichet sont effectivement de défendre
les intérêts de l’oligarchie financière apatride. Le fait est, qu’il les défend
objectivement par ses actions mais, paradoxalement, et je vais me faire ici
l’avocat du diable, je ne serais pas surpris s’il croyait vraiment faire son
boulot dans l’intérêt de tous. Comme l’explique quelqu’un comme Krugman dans
son dernier bouquin, les hommes qui ont la charge de piloter l’économie
prennent des décisions, non pas en fonction de ce qu’ils croient efficace, mais
en fonction de ce qu’ils croient que les marchés vont croire et qui va se
révéler auto-réalisateur. Sur la Grèce par exemple, on pourrait penser que
Trichet n’a visiblement pas retenu les leçons récentes de l’histoire
économique : ce n’est pas au moment où un pays est en difficulté qu’il
faut lui appliquer des mesures d’austérité budgétaire qui ne vont faire
qu’empirer les choses. Mais on peut aussi considérer qu’il doit tenir compte
des spéculateurs qui attaqueraient violemment si les mesures qu’ils estiment
justifiées ne sont pas prises. C’est un cercle vicieux qui ne peut être brisé
qu’en mettant fin, notamment, à la circulation sans entrave des capitaux.
Une autre hypothèse plausible et
compatible avec ce qui précède, est de considérer
que l’actuel gouverneur de la Banque Centrale est de la race des Pascal Lamy.
Il est convaincu d’être un bienfaiteur de l’humanité malgré elle. C’est un
dogmatique persuadé de détenir la vérité qu’il défendra envers et contre tout.
Il ferait un malheur en Corée du Nord.
Qu’elle que soit l’hypothèse
retenue, Jean-Claude Trichet concentre dans ses mains un redoutable pouvoir. C’est
bien là le drame du système économique tel qu’il fonctionne de donner tant d’influence à la parole (ce qu’il dit, mais
aussi ce qu’il ne dit pas) et aux décisions d’un seul homme. On me rétorquera
qu’il n’est pas seul et qu’il est dépendant d’une structure en place et des
hommes qui la composent et qui ont leur mot à dire dans les décisions prises.
Cela est vrai, mais il n’en reste pas moins que c’est lui le chef et qu’à ce
titre, il doit rendre des comptes au nom de son organisation. Et s’il s’avérait
au-delà du doute raisonnable, que les buts poursuivis sont effectivement de
défendre les intérêts du monde de la finance, il faudrait alors envisager de remonter
la guillotine remédier rapidement à
ce qui constituerait un énorme scandale.
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