A partir de la question centrale de la monnaie, les auteurs nous proposent de mettre en place une sorte de système économique parallèle qui ne viendrait pas concurrencer celui existant mais le compléter, en traitant des domaines que l’économie traditionnelle, essentiellement comptable, ne prend pas en compte et qui sont pourtant fondamentaux car ils permettent d’améliorer la qualité de la vie. S’appuyant sur des contes symboliques, ils mettent en évidence les absurdités que nous acceptons au nom d’une science économique qui ne s’intéresse qu’à une certaine forme de richesse, principalement celle qui peut être quantifiée, monétisée, tout en laissant de coté un vaste champs inexploité qui permettrait aux hommes non plus de gagner leur vie mais de la vivre. Car "La bataille de la survie a été gagnée : le potentiel de l’outil de production mondial est aujourd’hui suffisant pour assurer bien au-delà des besoins essentiels de tous."  Il est grand temps de considérer que l’activité humaine ne se résume pas aux bilans comptables des entreprises et de prendre en compte son utilité sociale : "Ce n’est plus produire le défi de notre temps, mais quoi produire, pour qui, dans le respect de quoi …". Il est aussi temps d’admettre que l’emploi tel qu’il est considéré aujourd’hui, a un avenir très compromis. Il est finalement temps de sortir du cadre qui nous est imposé pour imaginer les solutions aux immenses défis qui nous attendent. Et c’est ce que nous proposent les auteurs, en nous exposant en détail les principes de l’Espace Complémentaire Sociétal.

Reconnaissons-le, il n’est pas facile en refermant le livre, de ne pas faire preuve d’un peu de scepticisme tant ce que l’on nous propose parait sortir des schémas traditionnels. Les auteurs en sont bien conscients qui écrivent qu’"il est possible que (…) même séduit, vous soyez tenté de refermer le livre sur la simple impression  qu’elle [leur proposition] est utopique et n’a aucune chance d’être mise en application". Mais ils nous rappellent qu’en définitive, leur projet n’est pas plus utopique que ceux qui ont été formalisés par les Nations Unies au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale à travers la Charte Universelle des Droits de l’Homme et celle de la Havane. Que leur mise en œuvre laisse à désirer ne doit pas dissimuler le fait que le changement est nécessaire si nous voulons construire un monde meilleur. Pourquoi ne pas faire le pari que le moment est venu ?   

La crainte qui m’a un instant habité s’est rapidement dissipée : ce livre vaut la peine d’être lu. Je n’écris  pas cela ni par amitié pour A.J. Holbecq, ni parce que mon orgueil a été flatté de le recevoir de la part de l’éditeur et définitivement pas parce que mon blog est cité en référence. Enfin, je ne crois pas … Le fait est qu’une fois entamé, je l’ai lu pratiquement d’une seule  traite et je ne peux donc que le recommander afin que le débat ait lieu au sujet du monde que nous voulons construire.