Anti-mythes
Par RST le dimanche, 4 janvier 2015, 17:58 - Citation - Lien permanent
Ça y
est, c’est fait : j’ai enfin achevé la lecture de « Mythes et
paradoxes de l’histoire économique » de Paul Bairoch. L’ouvrage,
recommandé par Yann, patientait dans ma pile des choses à lire depuis des
années. C’est chose faite maintenant et je peux à mon tour en conseiller chaudement
la lecture à tous ceux qui sont intéressés par les faits avérés et qui pensent,
comme l’auteur, « qu’il n’existe pas
de "lois" ou règles en économie qui soient valables pour toutes les
périodes de l’histoire ou pour chacun des divers systèmes économiques »
mais que « à structures différentes,
évolutions et lois différentes ».
Mais comme, en ce début d’année, je suis trop fainéant pour faire une recension
en bonne et due forme de cet ouvrage majeur, je vous propose ci-après en vrac,
un pot-pourri tout à fait subjectif de citations à propos de certains de ces
mythes analysés par l’auteur. Cette façon de procéder n’est certainement pas la
meilleure façon de rendre justice au travail effectué par P.Bairoch, les citations
pouvant facilement être mal interprétées sorties de leur contexte. Prudence
donc et n’hésitez pas à vous référer au texte original pour éviter les
interprétations hasardeuses.
Protectionnisme
« Le protectionnisme
a toujours coïncidé dans le temps avec l’industrialisation et le développement
économique, s’il n’en est pas à l’origine »
Libre-échange
« (…) au XIXe siècle l’expérience de libéralisation des échanges échoua
complétement dans le tiers monde. Il n’est pas exagéré de dire que l’ouverture
de ces économies fut l’une des premières causes de l’absence de développement
au XIXe siècle. On est même très en dessous de la réalité en parlant de
non-développement puisqu’il s’agit là d’un processus de désindustrialisation et
de bouleversement des structures qui devait ultérieurement rendre le
développement économique plus difficile »
Croissance et
commerce
« (…) c’est la croissance économique qui entraine le développement du
commerce extérieur et non l’inverse »
Tiers-monde et
matières premières
« Si la dépendance à l’égard du tiers monde pour les matières premières
devint une réalité à partir de 1955, celle de la période précédente relève
entièrement du mythe. Les pays développés sont parvenus à un très haut niveau
d’industrialisation grâce aux matières premières locales et à l’exploitation de
leur propre main d’œuvre, mais c’est une autre histoire. »
Déficit
alimentaire
« La cause première du déficit alimentaire est la croissance
démographique ajoutée à un processus
d’urbanisation rapide qui généra une pression accrue sur les terres »
Productivité
« (…) durant le dernier demi-siècle le taux de croissance de la
productivité dans le secteur agricole fut presque deux fois plus élevé que dans
l’industrie (…)»
Production
agricole
« (…) l’essor rapide des importations alimentaires dans le tiers monde
[est] lié à la progression importante de la productivité qui caractérise
l’agriculture occidentale depuis le début des années cinquante, ce qui, entre
autres, eut deux effets déterminants : le premier est l’accroissement des
quantités disponibles et le second, l’inversement des coûts relatifs de
production »
Colonialisme
« (…) les ravages causés aux industries du tiers monde par le colonialisme
avec l’afflux de produits manufacturés n’ont pas eu un effet positif
correspondant dans le monde développé »
« (…) en règle générale les pays non coloniaux ont connu un développement
économique plus rapide que les puissances coloniales »
« Si l’Occident n’a guère gagné au colonialisme, cela ne signifie pas que
le tiers monde n’y ait pas beaucoup perdu (…). Il ne fait aucun doute que
l’origine de nombreuses caractéristiques structurelles négatives du processus
du sous-développement économique remonte à la colonisation européenne »
« (…) l’Occident fut loin d’être la seule puissance coloniale ; de
nombreuses civilisations eurent des empires plus vastes encore et qui durèrent
plus longtemps »
Démographie
« (…) la croissance démographique ne fut jamais un atout et (…) elle
représente dans tous les cas une contrainte importante »
Esclavage
« Comparé à la traite des Noirs organisée par les Européens, le trafic
d’esclaves du monde musulman a démarré plus tôt, a duré plus longtemps et, ce
qui est le plus important, a touché un plus grand nombre d’esclaves »
« L’unique raison pour laquelle la traite des Noirs organisée par les
Européens a eu une telle résonance est que ce fut la dernière d’une très
longue série ; et ce fût la dernière parce que l’Occident décida d’arrêter
ce commerce international à grande échelle et qu’il était assez puissant pour
imposer sa décision ».