Qu’ils soient avocats, conseillers ou tout simplement spécialistes, qu’ils travaillent pour les entreprises ou pour les particuliers, les fiscalistes ont pour seul et unique objectif de trouver le meilleur moyen de contourner les lois, pour le plus grand bénéfice de ceux qui font appel à eux et au grand préjudice de la collectivité. C’est ainsi que la filiale française d’une multinationale italienne s’est retrouvée, dans le cadre d’un contrat pour une compagnie pétrolière travaillant en Afrique, à sous-traiter des prestations à une société sœur au Portugal qui elle-même sous-traitait à la filiale de Croatie qui ne faisait que prêter son papier à en tête à la filiale qui faisait réellement le travail demandé, à savoir la filiale française. Vous n’avez rien compris à ce qui précède ? C’est le but recherché ! En découpant les prestations et en multipliant les niveaux, les avocats fiscalistes assurent une opacité totale et permettent à leurs prestigieux clients de bénéficier artificiellement des conditions fiscales les plus avantageuses. Quitte à prétendre que des activités ont lieu dans des pays où il ne se passe rien ou presque. Au niveau des particuliers, on peut prendre l’exemple instructif des footballeurs : grâce aux conseils avisés des fiscalistes, le footballeur Claude Makélélé, profitant du statut dit de l’impatriation, a pu économiser plus de 500 000 euros d’impôts par an !

Entre les niches fiscales et l’interprétation trop laxiste des lois, on frôle parfois – souvent ? – les limites de la légalité. Et c’est bien là tout le problème de savoir à  quel moment la ligne jaune est franchie, comment constater s’il y a fraude et comment punir. Les moyens disponibles ne sont ni très nombreux ni très efficaces. Comme le rapporte le journal Marianne du 5 au 11 septembre dans un article consacré à la récente campagne menée par le ministre du budget, Eric Woerth, pour lutter contre l’évasion fiscale: "Le droit français est d'ailleurs explicite : un inspecteur des impôts qui constate un délit fiscal ne peut saisir directement le procureur de la République ; il doit passer par la commission des Infractions fiscales, sage institution composée de magistrats, qui filtre les dossiers. Avec ça, les (gros) fraudeurs peuvent dormir tranquilles. Si l'on ajoute que Michèle Alliot-Marie, lorsqu'elle était ministre de l'Intérieur, a réussi à bloquer la création d'une police judiciaire fiscale, on comprend que Woerth partait avec un certain handicap." Et plus loin : "les avocats fiscalistes (…) se gaussent de l’impuissance de l’Etat ".

Pour notre plus grand malheur, ces " réducteurs de feuilles d’impôts" risquent de rire encore longtemps si l’Etat, au sommet duquel certains ont un accès direct selon Marianne, ne prend pas des mesures définitives pour les empêcher de nuire. En-a-t-il vraiment la volonté ? On peut légitimement en douter ! Comme les traders, les avocats-fiscalistes ont encore de beaux jours devant eux et nous, du souci à nous faire.