Au 30 avril 2009,  le total de la dette négociable de l’Etat français était d’un peu moins de 1 075 milliards d’euros, si j’en crois l’Agence France Trésor qui gère cette dette. Précisons que nous ne parlons ici que de la dette de l’Etat, hors administrations publiques locales et de Sécurité sociale (la dette publique de la France s’élève au total à environ 1 330 milliards d’euros). Comme indiqué sur le site de l’agence, le pourcentage des titres détenus par des non-résidents était d’un peu plus de 54% en août 2005 et a atteint plus de 65 % en décembre 2008. Il y a selon moi, deux manières d’analyser la situation. On peut, d’un côté, se réjouir en constatant que la situation économique de la France inspire de la confiance au reste du monde puisque celui-ci n’hésite pas à lui prêter de l’argent. D’un autre côté, on peut aussi s’inquiéter sérieusement du fait que notre indépendance  peut se trouver menacée par cette position fortement débitrice vis-à-vis de l’extérieur.

Quelle que soit l’attitude que l’on choisit d’adopter, il convient de le faire en ayant une vision juste de la situation. Or, comme j’ai pu le constater, ce n’est pas le cas de tous les économistes, certains défendant des théories basées sur des chiffres erronés. Cela devient tout à fait préjudiciable dans le cas de Michel Musolino par exemple,  auteur du livre "L'économie pour les nuls ", dont l’objectif est d’instruire le profane et qui, nous explique que la situation n’est pas si grave que cela puisque, d’après lui, « (…)  les créditeurs de la France sont essentiellement des… Français » ! Pour appuyer cette brillante démonstration il indique que « les non-résidents ne détiennent que 17 % de la dette ». Le livre ayant été publié en 2007, il aurait du prendre en compte 60 %  et non 17 % ! C’est un peu embêtant tout de même de se tromper aussi  largement.

Hélas, même des économistes plus sérieux, comme Dominique Plihon ne sont pas à l’abri de ce genre de mésaventure. Ainsi dans son ouvrage, remarquable au demeurant, "La monnaie et ses mécanismes ", indique-t-il que « (…) de 20 %  à 30 % de la dette publique française est détenue par des non-résidents ». A la différence de Musolino, il n’en tire pas de conclusion particulière. Quitte à apparaitre trop indulgent avec lui, signalons pour sa défense, que son livre a été réédité plusieurs fois et que tous les chiffres n’ont visiblement pas été remis à jour.

Ce n’est pas la première fois que je constate les libertés prises avec les chiffres par les économistes, certes pas toujours volontairement. Cela ne peut que nous inciter à la plus grande prudence face aux discours un peu trop simplistes tenus par ceux qui se réfugient derrière l’évidence … des chiffres ! Et d’ailleurs, je vais m’appliquer ce principe de prudence à moi-même en n’écartant pas la possibilité que, malgré mes efforts, je n’ai rien compris et que c’est moi qui ai tort et non les spécialistes cités ci-dessus …. J’espère que si c’est le cas, une âme charitable éclairera ma lanterne.

Note 

Pour approfondir sur le sujet de la dette, je ne peux que vous recommander, une fois de plus, l’ouvrage d’ André-Jacques Holbecq et Philippe Derudder :  La dette publique, une affaire rentable