Du nivellement social

« Le libéralisme, si on l’envisage à la fois économiquement et politiquement au niveau des nations, est le résultat du processus d’individualisation qui s’est développé à partir de l’Habeas Corpus Act, du 27 mai 1679. Ainsi, l’individualisme, produit de la sécurité juridique a-t-il sécrété le pluralisme et conduit à l’émergence de l’Etat de droit. A partir de l’émergence du fait politique, avec l’apparition de l’Etat de droit, se déclenche un processus qui a comme finalité, la communauté de citoyens par le biais de l’isonomia, c’est-à-dire un processus qui se donne comme finalité l’égalité numérique et le nivellement social »
« Et, à ce niveau là, il convient de rappeler que le but de la politique est celui de la création d’une communauté d’égaux en vue de bien vivre (Aristote). Or ce processus d’accomplissement implique nécessairement le nivellement social. Il passe donc inévitablement, non seulement par la réalisation de l’égalité devant le droit (isonomia) et l’égalité devant le pouvoir (isocratia), mais aussi par la mise en pratique de la justice contributive et la justice distributive. C’est donc à l’Etat de droit de créer les conditions du nivellement social. Lequel Etat implique non seulement la sécurité juridique, mais aussi la sécurité matérielle »

Il apparait donc que l’un des buts principaux du libéralisme est le nivellement social. Je n’ai pas entendu beaucoup de ceux qui se revendiquent libéraux,  insister sur ce thème que l’on attribue plus volontiers à la gauche de la gauche antilibérale !   

Des fonctions publiques

« Pour la société libérale classique (…) les fonctions publiques sont essentiellement temporaires : elles ne peuvent pas être considérées comme des distinctions, ni comme des récompenses, mais comme des devoirs »

Et c’est là que l’on constate, entre autre, que N.Sarkozy et sa clique sont tout, sauf des libéraux, de même, il est vrai, que tous ceux qui nous gouvernent depuis maintenant 40 ans. De Gaulle fut-il donc le dernier vrai libéral au sens premier du terme?

De chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins 

« Il s’agit, dans cette perspective axiologique, d’accorder les fonctions selon les capacités de chacun, de contribuer au bien être général et de donner des subventions à ceux qui sont dans le besoin. L’histoire politique a vu l’émergence du slogan : De chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins ! »

Si nous avons là l’un des  principes originels du  libéralisme, quelqu’un peut-il m’expliquer comment l’on peut se prétendre libéral et réclamer, par exemple, la suppression de la Sécurité Sociale ? Je crois qu’en fait, personne ne peut l’expliquer sauf à reconnaitre que le libéralisme a été dévoyé et ses principes pervertis.

Du libre échange et du protectionnisme

« Ce qui posait problème à la société libérale classique, ce n’était pas le libre-échange, ni le protectionnisme, mais le dumping et la thésaurisation. » 

« Le libre échange – le manchesterisme, comme on disait aussi à l’époque – impliquait le protectionnisme, comme l’Etat de droit contient l’Etat d’exception comme une possibilité. »

 « Cette politique protectionniste, d’un pays très excédentaire, était non seulement contraire à la politique libérale classique, où seuls les pays déficitaires ont recours au protectionnisme (…) » 

« Ainsi, la dimension économique se concrétise non seulement dans l’économie nationale, mais aussi dans l’économie internationale, selon les principes du libéralisme : du rapport entre le libre échange et le protectionnisme »

« Les souverainetés particulières, dans la logique du libéralisme classique, ont bien sûr la possibilité de protéger leur marché contre un partenaire qui fausserait durablement et systématiquement la concurrence »

Où l’on voit que le protectionnisme est totalement compatible avec le libéralisme car considéré comme un moyen de rééquilibrer les balances commerciales.

Blasphème libéral

« (…) la concurrence non faussée ne peut pas être laissée aux automatismes du marché »

Amen !

Du commerce comme protection contre la loi de la jungle

« L’avènement du libéralisme (…) a suscité l’espoir (…) que l’esprit du commerce se substituerait systématiquement à l’esprit de prédation, que le règne du droit (rule of law) l’emporterait partout, permettant la libre circulation des biens et de la monnaie pour accomplir la société des nations »

Et pas celle des personnes ?

Du néolibéralisme en tant que relais du marxisme

« L’avènement du réveil religieux des années 1980 et celui du néo-libéralisme, (…) sont inséparables »

« Le néolibéralisme, qui s’est progressivement institué à partir des années 1960, est un ordre dans lequel les nations les plus riches pratiquent non seulement le protectionnisme, mais aussi le dumping, tandis que les nations les plus faibles économiquement fonctionnent en libre échange »

« Le néolibéralisme s’est mis en place, dans sa forme aboutie, au moment où la pratique du marxisme disparaissait de la scène de l’histoire. (…) par une véritable inversion des valeurs, c’est, au bout du compte, un système fondé sur l’injustice, qui ne porte plus du libéralisme que le masque – décoré aux couleurs de la religion dans le cas américain -, qui s’est substitué à un autre système profondément inique (le socialisme réel) »

« De sorte que le néolibéralisme a créé les conditions de sa propre perte. (…) nous assistons au retour des classes et des castes, à la négation du nivellement social, qui fut le noyau même du projet politique libéral »

« Le néolibéralisme a pris le relais du marxisme pour alimenter une logique de négation du but éthique vers lequel doit tendre toute action politique : créer, comme le disait Aristote, une communauté d’égaux en vue de mener une vie la meilleure possible »

G.W.Bush et K.Marx même combat ?

 

De la conclusion

Rien de ce qui précède ne me choque, bien au contraire. Je souscris très largement aux divers principes posés par les citations extraites du livre de Palma et Husson. Cela fait-il de moi un libéral qui s’ignore, un refoulé qui camoufle sa vraie nature sous un déguisement d’antisarkozyste primaire gueulant dans les manifs qu’ "un autre monde est possible" ?

Une autre question angoissante surgit aussitôt: vais-je devoir faire acte de candidature au réseau LHC ? Non, je déconne, ils se prétendent libéraux mais, à la lumière de ce qui précède, ils n’ont pas la moindre idée de ce que cela signifie.